Il n'y avait pas de compte-rendu pour cette course donc, même si ça fait longtemps, je vais essayer de vous faire partager mon expérience.
Un petit tour par le site si ça vous dit :
http://www.themountainman.ch/fr.htmlUne petite capture d'écran pour les flemmards.
Bon, outre les petites douceurs habituelles (côtes de 10 à 300 m de dénivelé), le parcours comprend 3 "petites" montées de respectivement et dans l'ordre d'apparition, 600, 1100 puis 900 m de D+. Première fois que je me lançais dans si long et si pentu. Le but de ce trail est "de faire" la frontière entre l'Oberland et le Waldstätte. Sympathique promenade. A signaler aussi avant de commencer que le tracé de la Mountainman est indiqué par des petit panneaux en bois à l'année style GR. Le départ est à Trübsee et l'arrivée au Pilatus qui surplombe Lucerne (environ 1500m plus bas). Autre particularité, pour aller (et dans ce cas précis redescendre du Pilatus) on emprunte le funiculaire le plus raide du monde. C'était la deuxième édition, ils avaient changer le sens de la course (sens plus facile cette année dixit mes frères qui l'ont déjà fait l'année dernière car profil plus descendant, on y reviendra).
Enfin, l'organisation était suisse, c'est à dire top, un sauveteur tous les 500 m, des ravito tous les 7 à 8 km, la montée au départ et la redescente très bien organisées. Tout cela évidemment joue sur le prix qui est quand même de 150 francs suisse
. Vous ferez le calcul, ça fait mal mais c'est la plus facile 3 points pas trop loin donc le jeu en valait la chandelle. Je ne regrette pas une seconde. Il y a à peu prêt 180 partant sur le 81 km et les 5000 m de D+ avec un temps max pour finir de 15h30, et c'est super court, vous verrez plus tard. La course est un samedi, top pour ceux qui ne bosse pas le WE car on peut se remettre le dimanche, pour les autres, c'est moins bien.
Tout commence en fait la semaine avant le départ. Dernier entrainement à faire des tours sur un petit parcours plat de 2 km. Le 5ième, je le fais à fond pour me tester mais une petite douleur au genou m'oblige à ralentir. Rien de bien grave, je me dis qu'avec le repos, tout va bien aller.
Avec mes frères et mes parents (nos premières groupies, encore et toujours même si nous n'avons plus l'âge), nous partons pour Lucerne la veille. Nous avons pris un hôtel mais il est possible de dormir dans un abris anti-atomique suisse en dortoir de 80 mixte, mis à dispo (payante) par l'organisation de course. Ca ajoute au folklore. Le soir, dossard et pasta party, tout va bien. Debout à 4h, on prend le train à Lucerne (compris dans l'inscription) pour le départ 1h plus loin. Puis le télécabine pour arriver à Trubsee, charmant lac d'altitude et station de ski suisse. La course au WC est ouverte juste avant le départ, tout est minuté à la seconde, on a pas le temps de grand chose. La météo est magnifique, on va avoir chaud, très chaud !!
Et c'est parti, les sensations sont bien, 800 m d'échauffement autour du lac puis première difficulté, 600m de D+ pour monter au point culminant de la course. Tout va bien. J’hallucine au bout de deux épingles, je suis un coureur en sandale, j'en reviens pas. au moins 60 ans au compteur, un voisin suisse francophone me dit qu'il est connu en Suisse pour cela, ce traileur. Mais c'est pas finit, dès que ça monte, il enlève les sandales et continue la montée pieds nus
. Je suis sur le cul. Je crois malheureusement qu'il n'a pas fini à cause des délais.
La première montée se passe super bien, on double pas mal de monde (vu qu'à cause des toilettes, on était parti largement après le coup de feu). On arrive en haut et sur le premier replas, la douleur au genou se réveille. Heureusement, mon petit frère orthopédiste (toujours avoir un médecin chez soi) me diagnostique un syndrome de l'essuie glace (tendon extérieur qui frotte sur l'articulation du genou, une tendinite quoi). Un tout petit strap (pour répartir différemment les forces de frottement, dixit le médecin, moi la mécanique...) et ça repart mais les descentes sont délicates plus que douloureuses, les montées nickels car le muscle ne force pas avec ce tendon.
Cette première partie jusqu'à Gibel est merveilleuse. Nous faisons 24 km le long d'une crête avec de chaque côté un trou et des vues magnifiques sur les lacs et Interlaken. Un rêve, on court sans se fatiguer sauf mon grand frère qui fait son blocage d'avant 40 bornes. On reste ensemble pour finir ensemble même si mon petit frère une fois de plus surnage et moi, ne savant pas où je vais et ayant mal au genou, je reste tranquille. L'arrivée à Planplatten (télésiège de station de ski) est magnifique, les premiers relayeurs s'arrêtent, nous on continue. Du coup, on voit le tee-shirt de finisher, classe. Plus criard et moins mettable tous les jours que celui de la transju, mais classe. D'ailleurs, je ne le mets pas, c'est un vrai trophée.
On continue, Attention anecdote : suite à une envie pressante, je m'arrête dans un WC d'altitude suisse pour randonneur à 2000m d'altitude au milieu de nul part. Plus propre que tout ceux des restos de Lons, suisse quoi ! Au télésiège de Käserstatt (j'aime bien ces noms plein de dépaysement), un mur nous attend, très court mais au moins du 15 % et ça nous emmène à Gibel. Tout va bien, on attend le grand frère qui rame. Mais au moment de repartir pour la descente de 8 km et 1000 m de D-, le genou refuse de repartir, la douleur est vive et je suis à deux doigts de pleurer de dépit. Je me lance dans la descente en boitant, les larmes aux yeux de douleur et de déception. La descente est un enfer qui n'en finit pas, Je boite à chaque pas, je serre les dents. J'arrive en bas le moral dans les chaussettes. Heureusement, toute la famille est là car c'est le premier ravito où le public peut-être présent. Il y a un poste de secours, on me met une crème "miracle" devant me chauffer l'articulation (mon regret est de ne pas avoir vu la marque) et mon frère me fait un vrai strap et je repars pour la montée de 11 km et 1100 m de D+. Dans la tête, le moral est à 0, je me dis que je déciderai d'un éventuel abandon au prochain ravito car les montées, ça fait moins mal. Et là miracle, plus de douleur, je vole sur la montagne, j'avale la montagne en 2h05 (plus de 5 de moyenne pour les 11km et les 1100 de D+), je mets mon petit frère à 7 min et mon grand frère à 15. Je me sens dans une forme olympique (y a quoi dans cette pommade suisse ????). On repart vers Glaubebielen avec la forme. Deuxième ravito familial, tout va bien. Il me voyait abandonner, j'ai la pêche. Il me reste "un trail des reculées" à finir, je sais que je peux le faire.
Mais la suite n'est pas si facile. Autant jusque là, c'était grandiose au niveau des paysages et des sentiers la plupart en single sur crête, autant on entame 20 km dans la forêt, sur chemins blancs ou routes forestières. Le tout en faux plats descendant. Mes frères rigolent moins sur la difficulté car autant quand tu es frais en début de course (l'année dernière sur cette partie), tu peux relancer, autant là, ce sont des kilomètres qui certes avance relativement vite mais ça fait mal aux jambes, et avec ça, mon genou qui se réveille. Au poste de secours suivant, en plus du strap, c'est bande rafraichissante contre la douleur, que je tremperai dans toutes les fontaines croisées pour garder l'articulation au frais. La douleur sera présente jusqu'à la fin mais pas réellement handicapante. Et puis en haut de l'avant dernière difficulté, mon grand frère qui a retrouvé ses cannes depuis le 45ième kilomètre (comme d'hab quoi) nous met une accélération. Personne ne comprend. Et puis il nous dit que dans 30 min on doit être au prochain ravito car il y a une barrière horaire. C'est à 5,5 km de l'arrivée, juste avant la montée finale. Pour ne pas avoir de problème avec la redescente, l'organisation met une barrière de fou à 12h pour le 75ième kilomètre alors qu'il ne reste qu'une montée (bon quelle montée aussi). C'est un massacre : 149 participants homme, 51 abandons dont 25 à cette barrière horaire. C'est à cause de cette barrière que le temps est fait très court pour finir cette course
On arrive au ravito (avant dernier car il y en a encore un à mi-chemin dans la montée) de Lütoldsmatt avec 6 minutes d'avance sur la barrière, on avait calculer notre coup. Et puis il reste 5,5 kilomètres, de montée pour 900m de D+. C'est un mur devant nous, le soir tombe, la montagne prend des couleurs merveilleuses comme seule les Alpes en été peuvent en avoir. On a des ailes, on reprend un dizaine de personnes dans cette montée, les derniers lacets du Pilatus sont effroyables dans des cailloux roulant où les pieds ne trouvent que peu d'appuis. Et puis on entend dans la nuit tombante les cris de nos supporters qui nous ont suivis toute la journée avec courage. On finit au sprint dans les escaliers en acier de la station. On passe la ligne avec les jambes détruites mais heureux. on fait la montée en 1h15, quasi du 5 de moyenne sur cette dernière partie (avec un arrêt au dernier ravito à 2,7 km de l'arrivée). J'ai mal partout. En fait de plus facile, le premier met presque 30 min de plus que l'année dernière et mes frères 1h de plus. 14h16min.